LA PREHISTOIRE EN CORSE

 Préhistoire
Icône de détail Article détaillé : Préhistoire de la Corse.

Considérées un temps comme les premiers indices de présence humaine en Corse, les accumulations de bois du site de Macinaggio à l’est du Cap Corse sont aujourd'hui interprétées, par certains archéologues, comme des accumulations naturelles. L'occupation paléolithique de la Corse ne serait donc toujours pas attestée, même si elle reste possible.

Mésolithique (-9000 -6000) et Néolithique (-5700 -2000)


Les traces des premières occupations humaines datent du IXe millénaire avant l'ère chrétienne. La présence de plusieurs groupes humains est attestée au VII-VIe millénaire, au nord comme au sud de l'île. Il s'agit de groupes de chasseurs-cueilleurs et certainement pêcheurs, se nourrissant entre autres du lapin-rat (pika endémique du genre Prolagus) et également de coquillages. De cette époque ont été datés plusieurs sites et notamment celui de l’Araguinna Sennola, près de Bonifacio. Ce site, dont les fouilles ont commencé en 1966, a révélé un squelette féminin datant de -6500. Succède à ce premier peuplement, dont on suppose aujourd'hui qu'il s'agissait avant tout de simples fréquentations épisodiques de groupes en provenance du littoral italien, une véritable colonisation de l'île, avec la venue de communautés agropastorales néolithiques. L'arrivée de ces populations villageoises débute vers 5700 avant J.-C.

D. Binder et J. Guilaine font remarquer dans leur rapport Radiocarbone et processus de la néolithisation en Méditerranée centrale et occidentale que « dans la zone tyrrhénienne (Sardaigne, Corse, Latium, Toscane, Ligurie), les premiers horizons néolithiques dans la première moitié du VIe millénaire montrent généralement des styles céramiques structurés du Cardial et de l’Impressa ». La datation au carbone 14 a en effet donné de 5750 à 5350 av. J.-C., soit des dates contemporaines des autres sites italiens en Méditerranée. Ce « néolithique ancien cardial » a été identifié en divers endroits comme à Saint-Florent, Vizzavona ou Filitosa. Le premier néolithique en Corse appartient à la grande culture céramique de type Cardial ou Impressa (Gabriel Camps, 1988). Ce premier Néolithique est diffusé à travers toute l'île et a des caractéristiques très proches de la facies toscane méridionale, dite de Pienza. Gabriel Camps conclut : « C'est donc avec la Toscane voisine que la Corse présente [...] les plus grandes ressemblances », il insiste sur « la primauté des relations entre la Toscane et la Corse. » Cette primauté des relations remonte sans nul doute déjà au mésolithique et explique les dernières découvertes qui permettent de conclure sur cette période, sur le premier peuplement de la Corse : dès le néolithique les Corses seraient une population de langue italique, en provenance du continent, qui aurait parlé une langue proche des langues parlées en Toscane et Ligurie (sous-groupe dit tyrrhénien). Cette variante aurait été ensuite successivement influencée par la Sardaigne en ce qui concerne la Corse du Sud, par l'Italie des Osques et des Ombriens (indo-Européens) pour toute la Corse mais surtout le sud-ouest et par les Celtes pour toute l'île mais surtout la Corse septentrionale. Les anciens parlers en Corse, avant l'occupation romaine, avaient donc un fonds commun tosco-ligure, et ont ensuite été profondément romanisés. Ils ne constituent au plus qu'un lointain substrat au corse moderne qui est incontestablement un dialecte du toscan archaïsant comme le gallurais. L'interjection répandue Ajo ! en est sans doute un reliquat.

À partir de -5000 le peuplement de l’île s’intensifie avec l’arrivée de migrants vraisemblablement Ligures venus par cabotage par l’archipel toscan. Dès le VIe millénaire, ces nouveaux groupes néolithiques amènent avec eux les céréales et les animaux domestiques (le chien, les ovins, les caprins et les suidés), pratiquent le défrichage; ce qui conduira à l'extinction d'une partie de la faune endémique. De nombreux échanges existent entre Corse et Sardaigne. Ils concernent l'approvisionnement des néolithiques corses en obsidienne et silex sardes, roches utilisées pour confectionner de nombreux outils. Des influences continentales sont aussi décelables. Au IVe millénaire la production lithique et céramique de l'île s'inscrit dans le courant chasséen du néolithique de l'ouest méditerranéen. À la fin du IVe millénaire, une métallurgie du cuivre local apparaît sur le site de Terrina. On peut dire qu'à cette époque existe une véritable société insulaire organisée en villages ayant entre eux un réseau d'échanges et où l'île entretient des rapports commerciaux constants avec ses voisins.

Les vestiges laissés par la préhistoire en font en outre l'un des endroits privilégiés de l'Europe pour l'étude de cette période, et l'île représente aussi la plus grande concentration de statues-menhirs et menhirs de toute la méditerranée.

    * Les constructeurs de mégalithes

Alignement de menhirs de Palaghju, Corse du Sud

Les statues-menhirs qu'on trouve en divers endroits de l’île ; érigées entre -1500 et -800, représentent des guerriers portant épées courtes, ceintures ou baudriers, cuirasses sculptées en bas-relief. Celles-ci semblent monter la garde dans l’attente d’éventuels envahisseurs, comme pour en conjurer la venue. Ces statues-menhirs sont sans doutes autant de conjurations contre cet ennemi que de victoires dans un premier temps remportées sur lui. Il convient de préciser que la Méditerranée, à cette époque, connut un développement économique important, avec l'expansion du commerce des métaux. Cet essor a sans doute contribué au renforcement des inégalités et a favorisé les actes de piratage. Les populations se sont alors retrouvées contraintes de se protéger, en édifiant des forteresses, à l'image des "castelli" de Corse ou des « nuraghes » (voir culture nuragique) de Sardaigne.
Casteddu d'Araghju, Corse du Sud

Proto-histoire
L'île est sans doute connue des Phéniciens, auxquels elle devrait son nom de Korsai. Les Phéniciens propagent dans leur sillage l'agriculture : la vigne et le vin, l'olivier et l'huile, le blé et le pain ; leur organisation de la cité et l'écriture. Ils exploitent et commercent dans le monde antique les mines de cuivre, de plomb, d'étain, d'argent et de fer.

Les Phéniciens sont considérés comme parmi les meilleurs navigateurs du monde antique de cette époque. Ce sont avant tout des commerçants, non des colons, ils ne s’installent qu’entre terre et mer, sur des îlots, dans des criques protégées, dans l’arrière-pays desquelles ils cultivent ce qui est nécessaire à l’alimentation de leurs comptoirs et au remplissage de leurs entrepôts pour le ravitaillement de leur navires. Malte, les îles Pélagie, Utique et Motya en Sicile, Tharros et Nora dans le sud-est de la Sardaigne sont autant d’étapes sur leur route. Il n'est guère possible qu’ils n’aient abordé les rivages corses, même s'il ne subsiste aucune trace de leur passage sur l’île. Les cités côtières étrusques et ses ports, comme Pyrgi ou Populonia, sont autant de comptoirs pour eux et, pour conserver de bons rapports avec le pays des tyrréniens, sans doute jugent-ils préférable de leur laisser la prérogative du commerce avec l’île d’Elbe et la Corse dont ils trouvent les produits sur les marchés d’Étrurie.

Les Étrusques entreprennent réellement l'exploitation de la Corse. Ils se sont en effet tacitement partagé la domination de la Méditerranée occidentale avec les Carthaginois (voir Carthage) pour en contrôler le commerce. Aux Carthaginois reviennent la Sardaigne, l'Afrique du nord et le sud de l'Espagne, aux Étrusques la Corse et le littoral gaulois.

    * Le monde tyrrhénien

Selon Servius (Aen. X, 172), mentionné par Mario Torelli dans son Histoire des Étrusques, il est fait allusion à la fondation de Populonia (du nom du dieu étrusque Fufluns -Bacchus-), grand port et principal centre métallurgique de l'Étrurie, par les Corses, chassés par la suite par les habitants de Volterra. Ceci suggère qu'avant la naissance de l'Étrurie, lors de la période de la culture de Villanova, la population corse et la population de l'Italie centrale face à la Corse doit être sensiblement la même, et que pour le moins ils entretiennent des rapports étroits et se connaissent bien.

Le même texte fait également allusion à une histoire de piraterie sarde et corse dans l'aire tyrrhénienne, et ce durant le premier âge de fer. La barque votive figure dans les bronzes sardes et semble assez populaire dans ces îles de la méditerranée occidentale. Les échanges commerciaux entre l'Étrurie, la Sardaigne et la Corse semblent avoir été particulièrement intenses à cette période. Sur cette toile de fond viennent s'insérer les Phéniciens, probables médiateurs, et tirant les ficelles des relations commerciales de la région.

Le latrocinium (la piraterie) qui est relaté par les sources anciennes, n'est que l'autre facette du commerce maritime, et semble marquer les relations de deux entités qui d'une part s'affrontent et d'autre font du commerce : d'une part la légendaire occupation corse de Populonia, et d'autre la relative domination étrusque le long de la côte orientale de la Corse à l'époque historique.

Les sources écrites, principalement grecques, sont souvent contradictoires et, en en recomposant le puzzle de bribes éparses qu'elles forment, on parvient à situer la Corse et son histoire dans le monde méditerranéen et particulièrement sa place et son rôle en Méditerranée occidentale, mais on ne sait que relativement peu de chose sur la vie de sa population. C'est davantage grâce aux fouilles archéologiques effectuées dans l'île qu'on peut en avoir une idée plus précise.

source wikipedia